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Mis à jour
le 18/08/17
 Tycho-Brahé, Képler, Newton
 

Plan

Les fondements de la physique   Résumé
Mathématiser la Nature   La fin de la science grecque
Les symétries   Le blocage
Sauver les phénomènes   Quelques prémices
heliocentrisme   Nicolas Copernic
Les épicycles   La suite

Tycho Brahé, 14/12/1546-24/10/1601. Astronome danois, meilleur observateur à l’œil nu. Il a laissé les meilleures tables de positions de Mars, qui ont servi de base à Kepler pour établir les trois lois du mouvement des planètes. Son rôle dans ces études est donc capital.

Johannes Kepler, 27/12/1571-15/11/1630. Né le dans le Bade-Wurtemberg, il a montré que la planète Mars parcourait une orbite elliptique autour du Soleil, et trouvé la relation entre les périodes des planètes et leur distance au Soleil (lois de Képler).

Isaac Newton, 04/01/1643-31/03/1727. Savant anglais qui a défini la loi de la gravitation universelle. Sa loi, qui permet de démontrer celles de Kepler, est utilisée pour tous les calculs de mécanique céleste.

Les apports de l’Antiquité

Les fondements de la physique

L’Homme a toujours observé le ciel, et tenté de le comprendre. Pour cela, il a mis en jeu la magie, les dieux. Il a repoussé l’incompréhensible vers une puissance supérieure… ce qui au bout du compte n’expliquait pas grand chose ! Mais reporter les explications sur la volonté d’un dieu donne une liberté totale ! Tout est possible, s’il le veut… Et aussi, l’Homme peut l’influencer, et donc modifier, par ses comportements, par ses pratiques, le cours des choses. C’est la pensée magique, naturelle pour des personnes n’ayant aucune culture scientifique, aucune connaissance sur le fonctionnement de la Nature.

Les grecs utilisent les données accumulées avant eux, mais cherchent à les interpréter, pour essayer de comprendre et expliquer le monde. Ils refusent la pensée magique pour justifier ce qu’ils voient.

L’astronomie est le premier domaine dans lequel le raisonnement et l’observation ont cherché une explication du monde. Il ne s’agissait bien sûr que d’astronomie de position, mais ses implications sont considérables. C’est ainsi la première science.

Pour savoir où une planète se trouve dans le ciel, les premiers astronomes ont cherché des points de repère. Quoi de plus naturel que d’utiliser les étoiles pour cela ? Et la Lune, dont la taille sert si facilement de mesure… De là, la mesure des angles découle simplement. On peut donc comprendre que la mesure du cosmos commence ainsi de manière naturelle. N’oublions pas que les angles permirent aux égyptiens de refaire leur cadastre, chaque année, après la crue du Nil. Et qu’ils apparaissent tout naturellement dans la définition des heures, par le lever des étoiles brillantes.

Ainsi, l’astronomie a été le premier domaine où l’observation a pu se réaliser en termes de mesure. Les astres se déplacent avec le temps, et rythment sa mesure. Soleil et Lune sont les premirers signes, et ont donné les calendriers, avec bien sûr les durées particulières que sont le jour, la semaine, le mois et l’année.

La Nature n’est pas simple, et la comprendre demande un profond effort de raisonnement, de synthèse. Les premiers à avoir tenté cet effort sont les grecs de l’Antiquité. Ils ont construit un système du monde sur des bases bien précises, qui sont encore d’actualité aujourd’hui.

Mathématiser la Nature

L’Antiquité a produit deux grands principes pour apréhender le monde : les qualités, et les analogies mathématiques.

Les qualités sont attachées aux choses en ce sens qu’elles les caractérisent. Ainsi, la qualité du feu est la légèreté ; celle de la terre est la gravité (grave = pesant). Par conséquent, les flammes montent, et les pierres tombent. Ceci n’indique nullement si une pierre tombe plus vite qu’une autre, et ne dit pas pourquoi les flammes sont légères (possèdent cette qualité plutôt qu’une autre) et les pierres graves… "Votre fille est muette parce qu’elle est empêchée de parler" ! Ces qualités sont déduites de l’observation : la physique ainsi construite est donc uniquement observationnelle.

Les analogies mathématiques procèdent d’une toute autre vision du monde, vraiment abstraite. La première analogie utilisée associe les éléments aux polyèdres réguliers. Cette association est posée a priori : c’est un postulat. Une fois posée, on cherche tout ce qu’il est possible d’en déduire, et ensuite on confronte avec l’observation. C’est une méthode prédictive ! Si l’observation valide ces déductions, alors le principe qui les a permises est affermi. Cette démarche est toujours actuelle !

La première utilisation de cette méthode d’analogie a été faite par Empédocle (490-435 av. J.C.), avec les quatre éléments (terre, feu, eau, air) associés aux quatre polyèdres réguliers (cube, tétraèdre, octaèdre, icosaèdre, resp., nommés solides platoniciens). Les éléments se transforment les uns en les autres : l’eau gèle (la glace est de nature terre) ; la glace (terre) fond (en eau) ; l’eau s’évapore (air)… Ainsi, tout ce qu’on observe dans la Nature doit pouvoir s’expliquer en tant que combinaison de ces quatre éléments. Cette approche est donc analytique.

Cette association est totalement empirique, mais une fois faite, elle a des implications. La plus importante est due à la découverte d’un cinquième polyèdre régulier, le dodécaèdre. Puisqu’il y a maintenant 5 polyèdres, il doit y avoir 5 éléments ! D’où la notion de quintessence (la cinquième essence), ou d’éther.

Cette tentative n’a bien sûr pas abouti, car ses bases sont infondées. Mais la méthode est excellente. En fait, l’analogie est une représentation abstraite de la nature. Pour qu’elle fonctionne, il faut évidemment qu’elle soit réalisée en accord avec des observations précises.

La mathématisation de la nature a été perpétuée, sous une forme à la fois géométrique et algébrique, car elle permet de faire des mesures précises, et de les comparer avec une théorie.

Les symétries

Aristote pose comme principe l’existence d’un centre du monde. Ce principe découle des observations, par une généralisation : il savait que les objets tombent toujours à la verticale, c’est-à-dire perpendiculairement au sol. Il savait aussi que, si on marche longtemps vers le sud (par exemple), on voit des étoiles disparaître au nord, et d’autres apparaître au sud. Il avait bien compris que c’est parce que la Terre est ronde, et en a déduit que les objet tombent vers le centre de la Terre.

Puisque les corps graves tombent vers le centre, la gravité doit être isotrope. Alors, les corps tombant de tous les côtés, et les plus graves poussant les moins graves, la Terre doit être sphérique. La notion de "plus graves qui poussent les moins graves" annonce l’équilibre hydrostatique. Et bien que le centre de la Terre ne soit pas le centre du monde, le raisonnement est très moderne : non seulement la Terre est ronde, mais elle l’est parce que la gravité est isotrope !

L’isotropie de la gravitation est une symétrie. Ce faisant, Aristote a, le premier, basé une théorie sur une symétrie. Actuellement, toutes les théories physique sont ainsi fondées.

Sauver les phénomènes

Qu’est-ce qu’une théorie (un système du monde) ?

On peut demander plusieurs choses à une théorie :

Cette notion de sauver les phénomènes, ce qui revient à dire "obtenir des valeurs numériques en adéquation avec les observations", est due à Platon, dans son ouvrage le Timée.

L’héliocentrisme

Héraclide du Pont (388-310 av. J.C.) a, le premier, imaginé un système héliocentrique. Cette idée est tout à fait extraordinaire, car elle est totalement contre les apparences, et ne vise qu’à simplifier les modèles ! Pour cela, Héraclide a été surnomé paradoxologue (du grec para, à côté, doxa, règle, loi, et logos, discours).

Aristarque de Samos (310-230 av. J.C.) a conçu un système du monde héliocentrique. Le Soleil est immobile au centre. La Terre et toutes les planètes tournent autour. La Terre fait un tour en un an, et tourne sur elle-même en 24 h. Ce système est donc très proche du système actuel ; la différence tient dans la dynamique, inconnue à l’époque. Le seul mouvement envisagé était le mouvement circulaire uniforme. Et son application à ce système héliocentrique donnait des positions des planètes trop éloignées des positions observées. Ce défaut a provoqué son rejet par les contemporains d’Aristarque. Ces derniers lui ont préféré un système complexe constitué de sphères emboîtées. Pour expliquer correctment les mouvements, 56 sphères ont été nécessaires.

Les épicycles

En-dehors de la théorie des sphères, les mouvements des planètes ont été expliqués par des mouvements circulaires uniformes. Ceux-ci avaient l’avantage d’être simples, connus, et intéressants sur le plan esthétique. Ce dernier point est important, car il cache une très forte symétrie, puisque le cercle est invariant par toute rotation autour de son centre. De plus, le mouvement uniforme découle aussi d’un symétrie temporelle : les angles dont tourne la planète en des temps égaux, sont égaux. Et puisque l’orbite est un cercle (la distance de la planète au centre constante), les aires balayées en des temps égaux sont égales. Si on connait le mouvement képlérien, ceci semble naturel. Mais cette loi des aires avant la lettre était déjà dans les théories antiques.

Le mouvement des planètes n’étant pas si simple, le désacord entre les positions calculées et les positions mesurées ne pouvait passer inaperçu. Apolonius (262-190 av. J.C., connu des très anciens élèves de Math élem ou Math sup), avait étudié les coniques, et déjà pensé que les orbites des planètes pourraient être des coniques. Ce qui, pour lui, pourrait expliquer la vitesse variable de la Lune sur son orbite.

Mais une autre possibilité a été utilisée par Hipparque (190-120 av. J.C.) : elle consiste à faire tourner la planète sur un cercle (épicycle) dont le centre tourne lui-même sur un autre cercle (déférent). Le centre de l’épicycle parcourt le déférent d’un mouvement uniforme, et la plantète parcours l’épicycle d’un autre mouvement uniforme. On peut ajuster les rayons des deux cercles, ainsi que les vitesses de rotation sur chacun. En faisant de bons choix de ces paramètres, on arrive à ajuster à peu près les prévisions aux observations, donc à sauver les phénomènes.

Remarques

Résumé

L’approche de la science grecque tient en germe tous les principes sur lesquels la physique moderne reste basée. La mathématisation reste le point clé. C’est elle qui permet de prévoir les valeurs que prendront les phénomènes. Sans cela, la physique ne serait que philosophie.

L’analogie entre les objets physiques et des structures mathématiques (les polyèdres réguliers à l’époque), reste d’actualité. On recherche toujours des objets mathématiques, donc permettant le calcul, qui se comportent comme les phénomènes qu’ils sont censé représenter. Cette analogie a été utilisée, aux début de l’informatique, dans les calculateurs analogiques. Ces mmachines électroniques ne manipulaient pas des nombres, mais étaient construites à l’aide de circuits qui se comportaient comme les phénomènes qu’ils représentaient. Un pendule est un oscillateur amorti ; on lui faisait correspondre un circuit électronique oscillant, auquel on ajoutait un mécanisme absorbeur d’énergie, qui l’amortissait.

La sauvegarde des apparences, ou des phénomènes, consiste à produire un modèle (ensemble de formules de calcul), qui donne les mêmes valeurs. Ceci n’implique absolument pas que le modèle représente la réalité, il peut en être très loin… C’est la raison pour laquelle le système de Ptolémée a supplanté le magnifique système géocentrique d’Aristarque : Ptolémée sauvegardait les apparences, Aristarque était réaliste ! Mais les résultats d’Aristarque étaient moins bons.

La fin de la science grecque

Après Ptolémée, la science grecque a décliné, et personne en occident n’a repris le flambeau. Rome s’est constituée, et a dominé le monde méditerranéen. Les romains ont fait des merveilles en architecture, mais ils n’étaient pas forts en science ! Elle ne les intéressait pas. Un second coup a été porté par l’invasion arabe de l’Espagne et d’une partie de la France. La Terre est redevenue plate !

Pourtant, ce sont ces mêmes arabes qui ont récupéré l’Almageste traduit dans leur langue, et l’ont réintroduit en Europe, vers le Xe siècle. Les savants occidentaux qui lisaient l’arabe l’ont étudié, et ont adopté le système de Ptolémée.

C’est ainsi que cet ouvrage a servi, pendant 15 siècles, de seul modèle cohérent de description du monde. Modèle géocentrique bien entendu. On a donné le nom de Scolastiques à ceux qui ont enseigné ce modèle pendant si longtemps.

Le Moyen-Âge a été un temps de pratiques magiques, la recherche de la pierre philosophale étant la plus connue. L’alchimie procédait des mêmes méthodes que la chimie qui lui a succédé, mais sans un support théorique servant de guide. Elle allait à tâtons, et découvrait ainsi des résultats intéressants, mais sans liens les uns avec les autres.

Le plomb était considéré, dans la lignée antique des qualités des éléments, comme impur. L’alchimie avait pour but de lui ôter ses impuretés, et de remettre ainsi au jour sa nature véritable : l’or. Nous savons bien maintenant que cette quête était aussi vaine que celle de don Quichotte ! Les méthodes de la chimie (le feu), n’apportent que quelques électrons-volts, alors que la transmutation de plomb en or en nécessite quelques millions.

Nous allons voir maintenant comment on est sorti de cette période.

La révolution

Le blocage

Saint Thomas d’Aquin (1225-1274) a lu l’Almageste, et a fondé la doctrine de l’Eglise sur ses préceptes. Dès lors, les choses ont été figées, et toute personne osant contredire cet enseignement devenait hérétique. Ceci coûta la vie à Giordano Bruno, qui osa prétendre qu’il y avait une infinité de mondes et non la seule Terre. Et Galilée a dû abjurer après avoir prétendu que la Terre tournait autour du Soleil.

Pourtant, les idées évoluent quelque peu.

Quelques prémices

Nicolas d’Oresme (1320-1382) évêque de Lisieux, mathématicien et astronome, a montré qu’aucune expérience ne peut dire si les cieux tournent autour de la Terre, ou si la Terre tourne sur elle-même ! Mais il a aussi compris que les arguments d’Aristote (chute d’une pierre jetée en l’air veticalement), qui voulaient prouver que la Terre ne tourne pas, sont sans fondement. Il a écrit le traité du ciel et du monde, qui est sans doute le premier livre concurent de l’Almageste. Ce livre a probalement influencé Giordano Bruno. Malheureusement, Oresme n’avait pas à sa disposition les observations qui lui auraient permi de prouver ce système, et il l’abandonna. Il n’a pas remis en cause le géocentrisme. En physique, il a découvert la réfraction de la lumière…

Nicolas Copernic

Nicolas Copernic est né en 1473. Son destin était de devenir ecclésiastique, et il a été chanoine. Mais il était aussi astronome. A son époque, le seul système possible était celui de Ptolémée, et encore était-il soutenu par l’Eglise. Copernic, à qui ce système a été enseigné, et qui observe toujours à l’œil nu, va pourtant raisonner autrement. Son but est de simplifier les calculs nécessaires dans le système Ptolémée, et non de le détruire. Et e résultat qu’il obtint fut, dans son esprit, un artifice mathématique le permettant. Autrement dit, il ne considérait pas sa théorie comme réaliste. Cependant, il compris que la simplicité du modèle ne pouvait que refléter une plus grande adaptation au réel que le système géocentrique. Mais l’époque n’était pas favorable, et il attendit longtemps avant de plubier. Il attendit plus de 30 ans, et ne publia que peu avant sa mort, la même année 1543.

L’ouvrage s’intitule De Revolutionibus Orbis Celestium. Très ardu, son livre n’a pas eu d’échos, hors du cercle des astronomes. Il présente le système héliocentrique comme une hypothèse, et le Pape n’y a pas vu de contradiction avec le dogme.

Mais les idées ont fini par déborder ce cadre étroit, et la vision du monde en a été bouleversée. La Terre n’était plus au centre du monde, et l’Homme se trouvait donc relégué en bordure du système, alors qu’avant, tout semblait être fait pour le mettre au centre de tout, et donc pour lui. C’est un bouleversement intellectuel inimaginable pour nous qui sommes si habitués à tourner autour du Soleil.

Et l’Eglise a fini par réagir ! Si l’Homme n’est plus au centre de tout, la Création en est ébranlée… Le monde avait été fait pour nous, et voilà que nous en sommes au bord… Il ne faut pas oublier que Josué a arrêté le Soleil, et non la Terre ! C’est bien la preuve que c’est lui qui se déplace et non notre planète.

La littérature s’est emparée de cette idée, bien souvent pour la combattre, quelquefois en observateur dubitatif comme Montaigne.

La suite

On arrive à Tycho Brahé (1546-1601). Celui-ci est encore un observateur à l’œil nu, mais il construit des instruments plus grands, plus précis que ceux des prédécesseurs. Et il les utilise mieux que personne. De plus, il a la patience de poursuivre longtemps ses mesures. Le résultat est qu’il obtient des données suivies et d’excellente qualité sur les positions de Mars.

Les observations de Tycho Brahé ont permi à képler de trouver les trois lois qui régissent le mouvement des planètes. Et enfin, à l’aide de ces lois, et par des considérations géométriques assez simple, Newton a obtenu la loi de la gravitation. L’enchaînement de ces travaux, de Tycho Brahé à Newton, est un magnifique exemple de progression scientifique. Mais c’est un autre sujet…

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