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Mis à jour
le 18/08/17
 Théorie des cordes
 

Critique du Modèle Standard

Le Modèle Standard des particules est couramment utilisé aujourd’hui, et donne des résultats extrêmement bons comparés à l’expérience. Il décrit les particules élémentaires et leurs interactions, à l’exception de la gravitation. Ce n’est donc pas une théorie physique complète.

Chaque particule y est décrite par quelques paramètres : la masse, la charge électrique, la charge leptonique, le spin… Au total, il comporte ainsi 19 paramètres. Ces paramètres font partie de la théorie, mais celle-ci n’en fixe pas les valeurs. Ce sont des paramètres libres, dont les valeurs sont déterminées expérimentalement.

Cette liberté laissée aux valeurs des masses, en particulier, indique que la théorie n’est pas unique ! On pourrait en fait créer une kyrielle de théories ayant toutes les mêmes principes, mais des valeurs différentes pour les masses. Il semble que par cet aspect le Modèle Standard ne soit pas une théorie bien achevée.

La gravitation n’en faisant pas partie, la théorie est en plus incomplète. Elle ne peut décrire tout l’univers, mais seulement certains de ses apsects, ceux dans lesquels la gravitation est négligeable devant les autres forces. Ce qui en fait malgré tout une théorie fort utile, car la gravitation est 1040 fois plus faible que l’interaction électromagnétique, dans les conditions qui règnent aujourd’hui à peu près partout dans l’Univers (sauf peut-être dans les trous noirs). Mais ce manque est crucial si l’on veut expliquer une phase chaude de l’Univers à ses débuts : le Big Bang. La densité est alors telle que la gravité, par addition, devient aussi forte que es autres interactions.

Le Modèle Standard donne donc des résultats utiles pour l’immense majorité des applications qu’on peut en attendre, mais il pêche dans des cas très particuliers. Ce qui peut laisser penser que certains phénomènes qui se produiraient dans ces circonstances-là ne seraient pas prédictibles.

Le Modèle Standard décrit les particules élémentaires comme étant ponctuelles. Les diagrammes de Feyman représentent les différentes interactions possibles. L’ennui est qu’il y en a plusieurs, beaucoup, pratiquement une infinité… Si on fait la somme de toutes ces possibilités, on tombe sur des valeurs infinies. Or parmi elles, il y en a de simples, dont la probabilité de réalisation est élevée, et d’autres bien plus complexes, mettant en jeu de nombreuses particules intermédiaires, et dont la probabilité est faible. Pour ne pas prendre en compte, négliger, ces possibilités qui ne se réalisent presque jamais, les physiciens ont défini la méthode de renormalisation. Cette méthode s’applique très bien pour l’électromagnétisme, les interactions forte et faible, mais pas pour la gravité. On dit que celle-ci est non renormalisable. Et de là vient l’impossibilité actuelle de l’inclure dans le Modèle Standard.

L’aspect ponctuel des particules dans le Modèle Standard semble donc à l’origine de bien des problèmes. La Théorie des cordes remplace les particules ponctuelles par des cordes ayant une longueur, et c’est là l’idée de base.

Historique

La première idée est venue à Gabriele Veneziano. Il travaillait sur l’interaction forte, et se heurtait, comme ses collègues, à des problèmes insurmontables. Un jour, il a constaté une similitude mathématique entre ces problèmes et une fonction bien connue, la fonction β imaginée par Euler deux siècles plus tôt. Les solutions de cette fonction représentaient bien les résultats qu’il cherchait à interpréter. Mais sa signification physique n’apparaissait pas.

Il a fallu attendre 10 ans avant qu’émerge une interprétation, et c’est l’origine des cordes : les particules élémnt ires ne seraient plus ponctuelles, mais seraient d’inifintésimale cordes. Cette interprétation est due à Yoichiro Nambu, Holger Nielsen, Leonard Susskind. Si ces cordes étaient très petites, elles pourraient, dans l’état de nos instruments actuels, nous apparaître ponctuelles. Ce qui justifierait qu’on ne les ait pas découvertes expérimentalement. Les interactions entre ces cordes seraient représentées par la fonction β d’Euler.

Une fois l’idée de base lancée, il a fallu la mettre en pratique, et développer une véritable théorie. Et là, les difficutés se sont accumulées. Il a fallu peu de temps pour que des résultats expérimentaux viennent mettre en échec ces développements. Pendant ce temps-là, la chromodynamique quantique remportait tous les succès ! Rappellons qu’elle traite justement de l’interaction forte, que voulait résoudre également la théorie des cordes. Cette dernière a été abandonnée… presque.

Sans trop anticiper sur la description de la théorie, on peut dire que les cordes sont les constituants élémentaires, et que les particules que nous connaissons sont des états de vibration de ces cordes. Une même corde, vibrant à des énergies différentes, peut apparaître sous la forme de particules différentes. Les gluons, qui caractérisent l’interaction forte, sont ainsi représentés. Mais les cordes ont d’autre modes, qui pouvaient s’interpréter comme des bosons, mais ne correspondaient pas à l’interaction forte. Ceci était un défaut rédhibitoire de la théorie, mais il a tourné à son avantage lorsqu’on s’apperçut qu’ils correspondaient en fait au graviton… Tout au moins au graviton théorique, puisqu’il n’a pas encore été observé. On sait que les ondes gravitationnelles, portées par le graviton, ont été observées indirectement par l’augmentation de la période du pulsar binaire. Mais le graviton n’est pas connu expérimentalement.

Ainsi, une théorie faite pour expliquer l’interaction forte dans un cadre quantique, se trouve contenir, presque par accident, les éléments de la gravitation. C’était vraiment un atout très fort. Restait à le conforter par un développement harmonieux.

Echaudé par les multiples tentatives antérieures qui avaient lamentablement échoué, les physiciens n’ont pas cru à cette nouvelle approche. Et dans les années 80, on a même trouvé des incompatibilités entre la Théorie des Cordes et la Mécanique Quantique. En 1984, les problèmes ont soudain été résolus, par Green et Schwarz. Et mieux encore, ils ont montré que la théorie pourrait expliquer non seulement la gravité et l’interaction forte, mais aussi, tant qu’à faire, l’interaction faible et l’électromagnétisme.

Cet aspect universel de la théorie a emporté l’adhésion de nombreux physiciens, qui ont travaillé activement. Mais les calculs sont difficiles. Pire même, car les physiciens ont l’habitude des calculs pénibles, tirés d’équations bien connues. En Théorie des Cordes, les équations ne sont connues qu’approximativement ! En 95, Edward Witten a annoncé une nouvelle approche pour améliorer les équations et les calculs correspondants. Mais près de 20 ans plus tard, la situation n’est pas vraiment débloquée.

Définition

Les cordes seront supposées élémentaires, en ce sens qu’elles n’ont pas de structure, elles ne peuvent pas être décoomposées en entités plus petites. Plus petites que la longueur de Planck serait d’ailleurs difficile à envisager…

Les cordes ont une longueur fixe, et vibrent selon des modes définis par la longueur, tout comme une corde de violon. Les différents modes de vibration, donc d’énergie, de ces cordes définissent les masses et les charges des particules.

Ainsi, toutes les particules que nous connaissons seraient en fait identiques dans leur structure, toutes formées d’un même type de corde, mais vibrant différemment. Comme pour une corde vibrante de violon, l’intensité du son correspond à l’intensité de l’excitation. C’est une énergie d’autant plus grande. Et puisque l’énergie correspond à la masse (E = mc2), à chaque mode de vibration correspond donc une masse. Par conséquent, les masses auraient une explication !

Masses

Les masses posent cependant un problème. Si la longueur des cordes est la longueur de Planck, leur énergie quantique (due au principe d’incertitude), doit être de l’ordre de l’énergie de Planck. Convertie en masse, c’est la masse de Planck. Or celle-ci est absolument énorme : 1019 fois la masse du proton… C’est la masse d’un grain de poussière. Mais encore une fois, un phénomène sauve la situation. Les fluctuations quantiques des cordes leur confèrent une énergie négative ! Et la compensation pourrait se faire. Et elle se fait effectivement, comme l’ont démontré Scherk et Schwartz. Elles se compensent même exactement pour le graviton, qui de ce fait a une masse nulle. Ouf !

Tension des cordes

Pour vibrer, les cordes doivent être en tension, comme une corde de piano. Mais cette tension est énorme. et les modes de vibration possibles en nombre infini. Les particules que nous connaissons, dont la masse est minuscule par rapport à la masse de Planck, sont donc les modes les plus calmes. Et il devrait exister d’innombrables particules de grande masse, correspondant aux modes de grande énergie. Il est évident que nos accélérateurs de particules sont infiniment loin de pouvoir créer de telles particules. Existent-elles réellement ? L’énergie nécessaire pour les créer était disponible un instant après le Big Bang. Il devait donc y en avoir. Mais leur grande masse les rend instables, et elles ont dû se désintégrer en une myriade de particules plus légères, celles que nous observons.

Compatibilité de la Relativité et de la Mécanique Quantique

Le problème d’incompatibilité entre ces deux théories provient de leur description de l’espace. Pour la Relativité, l’espace-temps est continu, lisse. Pour la Mécanique Quantique, à très petite échelle, vers la longueur de Planck, l’espace-temps lui-même perd cette continuité et devient fluctuant. C’est la source des problèmes entre les deux descriptions du monde. La Théorie des Cordes ne présente pas ce problème, pour une raison d’échelle.

Pour sonder la matière et en découvrir la structure, nous utilisons des accélérateurs, qui projettent des électrons ou des protons à très grande énergie. Plus l’énergie est grande, plus la longueur d’onde de de Broglie associée à la particule est petite. C’est ce qui fait qu’elle nous permettent de voir des détails aussi petits que leur longueur d’onde elle-même, d’autant plus petite que leur énergie est plus grande. Les particules dans le Modèle Standard étant ponctuelle, il n’y a pas de limite inférieure réelle pour sonder la matière.

Avec les cordes, le problème est radicalement différent. Les cordes ont une longueur finie, et même en augmentant leur énergie on sera limité par leur longueur, qui ne permettra jamais de sonder à plus petite échelle. Mais si la Théorie des Cordes représente vraiment le Monde, alors rien ne permet de voir à plus petite échelle. Par conséquent, les fluctuations quantiques de l’espace-temps, qui sont à plus petite échelle, sont invisibles à toutes les particules, et le problème ne se pose tout simplement pas.

Les symétries

De nombreux phénomènes physiques admettent une symétrie. La plus évidente est la rotation : une sphère peut être tournée dans tous les sens, elle reste identique à elle-même. Plus subtile, la symétrie temporelle des lois de la Mécanique. La relation fondamentale de la Mécaniqe, F = m d2x / dt2, ne change pas si on change t en -t. Autrement dit, si on fait passer le film à l’envers, on voit les objets suivre la même trajectoire, mais dans l’autre sens. La physique regorge de symétries, et l’on peut même dire qu’aujourd’hui elles sont à la base des théories.

Le Modèle Standard des particules n’échappe pas à la règle. Il présente de nombreuses symétries, qui correspondent à des lois de conservation. Mais tout n’y est pas symétrique. Les particules se divisent bien en deux camps : les fermions et les bosons. Entre les deux, un mur.

Certains physiciens sont allé au-delà de ce qu’affirme ce modèle, et ont ajouté une nouvelle symétrie : celle qui permet d’échanger les bosons et les fermions. Si elle est vrai, cette symétrie permet à un boson de devenir fermion par une désintgration, et réciproquement. Un petit problème : aucun fermion connu ne correspond à un boson connu… idem dans l’autre sens d’ailleurs. Alors, pour admettre cette nouvelle symétrie, il faut accepter de doubler la ménagerie des particules !

Le spin

Les deux physiciens hollandais Uhlenbeck et Goudsmit ont, en 1925, réfléchi sur le magnétisme associé à l’électron. Dans la théorie de Maxwell, le magnétisme nait du mouvement de charges électriques. L’électron possède bien une charge, il lui manquait le mouvement. C’est le spin qui y pourvoit. Le spin est une sorte de rotation sur lui-même de l’électron, propriété quantique puisque l’électron est une particule ponctuelle. Défini pour l’électron, le spin a vite été étendu à toutes les particules matérielles, qui ont un spin de +1/2. Ensuite, ce sont les particules d’interaction qui ont été dotées d’un spin, mais il est entier, de valeur +1. Sauf le graviton, dont le spin vaut +2.

Dans la théorie des cordes, il est apparu un état de vibration qui correspond à une particule de masse nulle et de spin +2, ce qui permet de dire qu’elle contient la gravitation. Une désintégration permet de transformer une particule lourde en une particule plus légère. Ce qui est vrai de la masse le serait-il du spin ? Dans le Modèle Standard, ce n’est pas pris en compte. Mais certaines théories introduisent une nouvelle symétrie, qui permet de passer d’un spin à un autre, d’un demi-entier caractérisant les fermions à un entier caractérisant les bosons. Ceci est la supersymétrie. La Théorie des Cordes l’a incorporée, dans sa version Supercordes.

Théorie des supercordes

Elle inclus la supersymétrie, ce qui a pour effet d’associer à chaque particule une particule dont le spin diffère de ±1/2. Une particule qui diffère ainsi est nommée superpartenaire. En ajoutant 1/2 au spin d’une particule matérielle (électron, proton…), on obtient une particule de spin +1, c’est-à-dire un boson. Ainsi, la supersymétrie permet de transformer un fermion en boson, et un boson en fermion. Juste un petit problème : les particules connues ne peuvent ainsi s’apparier. Ce n’est pas pour rien qu’on n’a pas découvert la sypersymétrie à ce jour…

Les théories supersymétriques ont donc prévu de nouvelles particules. Et pour les nommer, on utilise une méthode systématique. Le nom des superpartenaires des fermions (électron, quarks, neutrinos de spin +1/2) se forme en ajoutant un ’s’ initial au nom du fermion. Le superpartenaire de l’électron est donc le sélectron, celui du quark est le squark, celui du neutrino le sneutrino. Ils sont de spin 0. Pour les bosons, on utilise le suffixe ’ino’ ajouté au nom du boson. Le superpartenaire du photon est le photino, celui du gluon est le gluino. Les bosons intermédiaires Z et W donnent le zino et le wino. Aucune des superparticules n’a encore été découverte.

Quelle est la pertinence de cette supersymétrie ? On peut dire qu’elle est mathématiquement nécessaire, mais la Nature n’est peut-être pas forcée de suivre la mathématiques… Mais physiquement, le Modèle Standard est difficile à maîtriser à cause de fluctuations quantiques, qui produisent des effets parfois énormes, non observés. Or la supersymétrie, par des échanges entre bosons et fermions, calme le jeu. Le Modèle Standard Supersymétrique est donc plus stable que son ancêtre.

Enfin, l’unification des forces est prévue par la Mécanique Quantique, en considérant les fluctuations qui se produisent à proximité d’une particule (création-anihilation de paires). Mais elle ne se produit que deux par deux. Par contre, la supersymétrie, là encore, lisse le processus et produit une véritable unification.

Masses

Les calculs faits sur les superpartenaires indiquent que leurs masses doivent être très élevées, mille fois plus que le proton. Et nos accélérateurs n’atteignent pas cette zone, ce qui explique que les superparticules n’aient pas été observées jusqu’à maintenant.

Supercordes

Au départ, la théorie des cordes ne décrivait que des bosons, c’est-à-dire des particules de spin entier. Lorsqu’on a essayé d’inclure des modes fermioniques, ils sont apparus par couples avec des modes bosoniques. C’est-à-dire qu’on a créé à la fois des fermions et des bosons ; ils arrivent naturellement appariés, confortant l’approche supersymétrique. De plus, la supersymétrie évite la présence de tachyon (particules superluminiques), bien embarrasants dans la théorie première.

La surprise

En 1919, Theodor Kaluza, mathématicien polonais, a imaginé un univers dans lequel il n’y aurait pas 3, mais 4 dimensions d’espace… Mathématiquement, c’est parfaitement possible. Voyons pourquoi :

Considérons un espace à une seule dimension. C’est une ligne droite toute simple, sur laquelle on peut aller dans un sens ou dans l’autre. Il est assez naturel d’orienter la droite, pour savoir dans quel sens on se déplace. Alors, un déplacement dans le sens de la droite est positif, dans le sens inverse il est négatif. Sur cette droite, on peut définir des longueurs, d’un parcours par exemple. Si on se déplace dans le bon sens, le sens positif, la longueur du parcours est la différence entre les positions de l’extrémité et de l’origine. Mais dans le sens inverse, cette différence est négative. Prenons le carré pour avoir toujours un nombre positif.

Passons à deux dimensions. On a maintenant une surface, comme une feuille de papier. Il faut deux axes pour indiquer la position d’un point quelconque. Et pour définir la longueur d’un segment, on utilise le théorème de Pythagore : l2 = x2 + y2. Il donne comme précédemmment le carré de la longueur.

En compliquant un peu plus, on passe à trois dimensions. On projette le segment à mesurer sur le plan (X, Y). Dans ce plan, la longueur de la projection est lXY2 = x2 + y2. Et la longueur du segment donné, par une seconde application du théorèe de Pythaogre, est l2 = x2 + y2 + z2.

Pour ces trois dimensions d’espace, le carré de la longueur d’un segment est donc toujours la somme des carrés des projections du segment sur les axes.

Pourrait-on imaginer un espace à 4 dimensions ? Pourrait-on y mesurer la longueur d’un segment ? Oui, en procédant tout simplement par analogie. On pose que la longueur d’un segment est l2 = x2 + y2 + z2 + t2. Si on veut que les axes soient orthogonaux, il faut analyser ce que signifie cette propriété. Deux axes sont perpendiculaires si le produit scalaire de leurs vecteurs unités est nul. Il suffit de définir un produit scalaire en dimension 4 pour satisfaire cela.

Avec ces outils mathématiques, on est donc capable de construire, mathématiquement, des espaces de dimension quelconque (même infinie, mais oui…).

Kaluza a défini un espace un peu particulier, car il est évident pour tout le monde que notre espace physique n’a que trois dimensions d’espace, pas une de plus. Pourtant, imaginez qu’il existe une quatrième dimension, mais toute petite, enroulée sur elle-même. Tellement petite, que nos moyens physiques ne nous permettent pas de la distinguer. C’est un peu difficile à imaginer bien sûr, mais c’est envisageable. Un tel espace physique n’apporterait pas de contradiction.

L’image classique est celle de la fourmi qui marche sur un long tuyau d’arrosage. Vu de loin, le tuyau paraît un fil, unidimensionnel. Il faut le voir de près pour s’aperçevoir qu’il présente une seconde dimension enroulée, sur laquelle la fourmi, à la même échelle, est capable de tourner. C’est quelque chose comme ça que les particules élémentaires pourraient ressentir.

Théorie de Kaluza-Klein

Kaluza a suggéré que l’ajout d’une dimension permettrait d’unifier la Relativité Générale avec l’électromagnétisme. Une telle performance justifiait que l’on s’intéresse de près à la question. On nomme Théorie de Kaluza-Klein toute théorie qui explique la physique dans un espace à plus de 3 dimensions.

En ajoutant une diension à un espace, on ajoute des libertés. Comme la fourmi qui peut faire le tour du tuyau, les particules peuvent maintenant s’offrir de petites incursions dans un nouvel espace. Kaluza a réécrit les équations de la Relativité Générale, mais la quatrième dimension a produit, obligatoirement, de nouvelles équations. Il faut bien décrire ce qu’il se passe dans cette extension de l’espace. Et la surprise a été que es équations ajoutées étaient identiques aux équations de Maxwell de l’électromagnétisme.

Relativité Générale + quatrième dimension = Relativité Générale + électromagnétisme.

Ainsi, cette modification de l’espace permet de décrire simultanément deux théories majeures de la physique. La gravitation provient des dimensions habituelles, et l’électromagnétisme découle de la quatrième.

Les problèmes sont pourtant arrivés peu après. Les prédictions de cette théorie pour la masse et la charge de l’éelctron ne correspondaient pas avec les observations. Celles-ci devaient avoir raison ! Le physiciens se sont tournés vers d’autres problèmes. Jusqu’aux années 80.

Le interactions faible et forte étaient inconnues lors du travail de Kaluza. Alors, on a pensé que c’était la cause des problèmes de la théorie. Il était temps de la ressortir de la naphtaline. Et puisqu’une dimension de plus permettait de décrire une interaction, il suffisait d’en rajouter encore pour décrire les autres !

Mais attention ! Les nouvelles dimensions, comme celle de Kaluza, doivent être enroulées et microscopiques. Et présentes en chaque point de l’espace. En chaque point, il faut imaginer qu’il y ait plusieurs dimensions enroulées…

Topologie

Comment s’enroulent-elles ? Supposons qu’il y en ait deux. Elles peuvent former une sphère, ou un tore. Bref, il n’y a pas une solution unique.

L’ajout de dimensions a donné quelque chose de très encourageant, mais les calculs ont rapidement fait déchanter. On a ajouté 7 dimensions d’espace, pour satisfaire des problèmes de probabilité.

Comment ces dimensions supplémentaires peuvent-elles influencer la physique ? Puisque celle-ci est basée sur les modes de vibration des cordes, qui représentent les particules, il est évident que plus les modes sont riche, plus la physique l’est également. Et les dimensions supplémentaires donnent de l’espace aux cordes pour vibrer dans un espace plus vaste. On conçoit que ces dimensions ajoutent beaucoup de liberté aux cordes, et permettent par conséquent de représenter des particules plus variées.

A quoi ressemblent les dimensions enroulées ? Si nous en avions une seule, ce serait simple, elle s’enroulerait selon un cercle. Mais il y en a 7. Et le nombre de possibilités est quasiment infini. Or parmi tout cela, Eugenio Calabi et Shing-Tung Yau ont étudié peut-être les plus simples, qui forment déjà une vaste famille contenant plusieurs dizaines de milliers de membres. Mais on ne connait pas du tout les autres. Ces espaces de Calibi-Yau sont donc exemplaires, mais pourquoi la Nature aurait-elle choisi juste ceux qu’on sait étudier .?

Cependant, l’étude de ces espaces est intéressante à titre d’exemple. Si la théorie des supercordes est la bonne théorie pour décrire l’Univers, il faudra choisir la topologie (la combinaison des enroulements) qui produit les bonnes lois de la physique. Parmi une infinité de possibilités, ce n’est pas chose facile. Les espaces de Calabi-Yau constituent donc un exemple, qui doit permettre de bâtir une physique, au risque que ce ne soit pas la bonne.

Vérification expérimentale

Les cordes sont, pas définition, de la longueur de Planck. Pour sonder la patière à ces distances, il faut une énergie que nous sommes vraiment très loin d’atteindre. On imagine qu’il faudrait un accélérateur de particules de la taille de la Galaxie ! Il faudrait communiquer à une particule une énergie de 1.000 kW/h… Dans ces conditions, nous ne sommes pas près de vérifier directement la théorie.

L’espoir qu’il reste est de trouver des implications qui se manifesteraient dans des effets observables, c’est-à-dire à une échelle accessible.

Une première approche concerne le nombre de familles de particules. On sait qu’il y en a trois : l’électron, le muon et le τ sont les représentants de ces trois familles. Il est pratiquement établi qu’il n’y en a pas plus. Or le nombre de familles serait relié à la topologie de l’espace de Calabi-Yau sous-jacent. Plus précisément, l’enroulement des dimensions supplémentaires peut laisser des trous dans la topologie. Et le nombre de trous, en limitant les mouvements des cordes, fixerait le nombre de familles. Ainsi, pour expliquer trois familles de particules, il faudrait juste trois trous dans l’espace de Calabi-Yau. Mais actuellement, on ne sait pas faire le lien entre la forme de l’espace et les équations de la théorie. On peut espérer que les progrès mathématiques le permettront un jour.

La forme des enroulements modifie aussi les masses des particules, leurs charges, toutes leurs propriétés. En raisonnant à l’envers, on peut donc espérer déterminer cette forme à partir des propriétés observées. C’est donc un critère macroscopique qui permettrait d’atteindre le niveau microscopique des cordes.

Mais tout cela ne sera possible que le jour où on sera capable de calculer ces paramètres (masse, charges…) à partir de la topologie de l’espace de Calabi-Yau. On en est encore loin, car les méthodes mathémtiques disponibles sont très approximatives.

Mais la théorie des cordes reste en lice, parce qu’on a montré qu’il existe des espaces de Calabi-Yau qui représenteraient correctment les particules. La porte reste donc ouverte.

Nous avons vu que les modes de vibrations produisent, par paires, des bosons et des fermions. La supersymétrie est donc dans la théorie. Or elle prévoit toute une ménagerie de particules que l’on n’a pas encore observé. Peut-être parce qu’elle sont trop lourdes pour les moyens actuels ? Peur-être le LHC les découvrira-t-il ? Peut-être sont-elles encore trop lourdes pour lui ? Peut-être n’existent-elles tout simplement pas parce que notre univers n’est pas supersymétrique…

La théorie des cordes pourrait aussi prévoir des particules à la charge fractionnaire différente de 1/3. Aucune telle particule n’a été observée. Finalement, la théorie des cordes est tellement riche, qu’elle peut prévoir un peu tout !

En particulier, on l’a invoquée pour représenter la matière noire. Mais on ne peut aller plus loin, faute de preuves.

Pléthore

L’incorporation de la supersymétrie s’est bien faite dans la théorie des cordes, mais trop bien ! En fait, elle s’est faite de cinq façons différentes, donnant finalement 5 théories des supercordes. 4 de trop…

"Si l’une des cinq théories décrit notre univers, qui donc habite les quatre autres ?"
Edward Witten

En fait, les calculs sont très difficiles, et ne peuvent se faire que de façon approchée. Et on a finalement montré que les 5 théories étaient 5 approximations différentes d’une même théorie baptisée Théorie M.

Les branes

Jusqu’ici, nous avons considéré les cordes comme des objets unidimensionnels, dans un espace à 10 dimensions. Mais ceci est bien restrictif. L’espace dont nous avons l’habitude, à trois dimensions, contient des sous-espaces. Un sous-espace est une partie de l’espace qui peut être décrite avec un plus petit nombre de paramètres. Pour donner la position d’un point dans l’espace, il faut trois variables (x, y, z). Mais si on se limite à la surface du sol par exemple, deux dimensions suffisent (x, y), puisqu’il n’y pas de hauteur, ou plus précisément la hauteur est la même partout, et peut donc être omise. Au lieu d’un plan, on peut considérer la surface d’un tissu, d’une membrane, avec des ondulations. Mais si la description est plus complexe, elle peut toujours se faire avec deux variables seulement. On peut aussi considérer une ligne droite, et un point quelconque est repéré par une seule variable (x).

Dans un espace à 10 dimensions, comme celui de la théorie des cordes, on peut aussi considérer des sous-espaces. Ils auront 0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, ou 9 dimensions. Par analogie avec notre espace habituel, où une membrane est une surface à deux dimensions, on appelle brane un sous-espace quelconque. Et pour préciser sa dimension, on parle de D-brane, D étant la-dite dimension.

L’existence de ces branes enrichi considérablement la théorie, et la complique aussi beaucoup. Elle a des implications cosmologiques, mais ceci est une autre histoire…

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