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Mis à jour
le 18/08/17
 Etoiles symbiotiques
 

Prélude

Les étoiles symbiotiques ont été découvertes dans les années 30 par Paul Merril et Milton Humason. Ils ont décrit trois étoiles de type M (rouges) à émission He II λ4686 (couleur : bleue). Ces étoiles étaient des variables à longue période. Certaines étaient de plus des binaires spectroscopiques. Par la suite, d’autres étoiles ont été ajoutées à cette première liste.

Milton Humason a un point commun important avec Jean-Louis Pons : tous deux ont commencé leur carrière comme concierge de leur observatoire !
Jean-Louis Pons d’abord, en 1789 fut embauché comme concierge à l’Observatoire de Marseille, dont il devint en 1813 astronome-adjoint, puis après un séjour comme directeur de l’observatoire de Marlia, il dirigea celui de Florence. Il reste le plus grand découvreur de comètes à l’œil nu.
De son côté, Milton Humason a été embauché comme concierge à l’Observatoire du Mont Wilson en 1917. Il a été nommé astronome en 1919, puis il a été l’assistant de Hubble, qu’il a grandement aidé dans son travail sur les spectres des galaxies.

Certaines de ces étoiles ont montré un phénomène de type nova, avec des éruptions allant de 1 à 3 magnitudes. Leur étude a montré que les spectres sont combinés : ils présentent à la fois les caractéristiques d’une géante rouge, et celles d’une nébuleuse planétaire. Par ailleurs, dans tous les cas où la mesure a été possible, on a conclut qu’il s’agissait d’étoiles doubles. Merrill a proposé en 1941 le nom d’étoiles symbiotiques, qui leur est donné depuis.

Comme on peut l’imaginer, le terme symbotique provient de la biologie. Une symbiose est une association de deux organismes qui échangent des substances chimiques, au profit des deux. Ici, ce sera une association de deux étoiles qui échangent de la matière. Mais l’analogie n’est pas parfaite, le transfert de matière se fait dans un seul sens. Quand à dire quelle étoile en profite, c’est une autre histoire...

Une géante rouge est associée à une étoile plus chaude et plus compacte.

Elle déverse de la matière à la surface de celle-ci.

La composante chaude donne un continuum faible du côté bleu du spectre.

Les étoiles symbiotiques se sont ainsi montrées importantes, car elle permettent d’étudier :

Les conditions physiques qui règnent dans de tels milieux sont souvent extrêmes, aussi ces étoiles sont de bons laboratoires pour étudier les phénomènes qu’elles produisent.

La perte de masse est en général étudiée par deux de ses manifestations : le rayonnement infrarouge des poussières et le rayonnement radio des molécules, les unes et les autres produites par le refroidissement du vent stellaire. On peut donc, par l’intensité des absorptions, connaître la densité de ces poussières et molécules. Mais elles ne représentent qu’une petite fraction de la matière éjectée, de l’ordre de 1 %, sans plus de précision. Il n’est donc pas possible d’extrapoler sérieusement à toute la matière perdue par vent stellaire.

Les observations

R Aqr

Etudiée par Merrill, R Aqr est une variable à longue période de type Mira, qui présente un spectre :

Z And

Z And, étudiée par Plaskett dans la même période, présente aussi un spectre composite :


Spectre de Z And d’après S.J. Kenyon

Z And a montré des sursauts de 2 magnitudes, avec changements significatifs dans le spectre, le continuum effaçant presque les raies d’absorption de type M. En même temps, la plupart des raies d’émission disparaissaient, et les raies en émission H I et He I présentaient un profil P-Cygni. Cette dernière caractéristique a amené les astronomes à considérer que toutes ces étoiles devaient être des binaires.

La rapidité de variation de ces étoiles les distingue des autres géantes rouges variables, dont les périodes sont beaucoup plus longues.

Emission et absorption

La présence simultanée de raies d’émission et d’absorption trahit l’existence de deux milieux aux propriétés physiques distinctes.

Les raies d’absorption sont le résultat du passage de la lumière dans un milieu froid, dont les atomes vont s’exciter par absorption des longueurs d’onde correspondant à leurs niveaux d’énergie. En se désexcitant, ces atomes vont rayonner bien sûr la même énergie que celle reçue, mais d’une part elle peut être transformée en rayonnement de plus grande longueur d’onde par phénomène de cascade (elle apparaîtra alors dans une autre partie du spectre), et d’autre part ce rayonnement est produit dans toutes les directions de l’espace, en très faible partie vers l’observateur.

Les raies d’émission, à l’opposé, sont produites par un milieu chaud, dont les atomes sont constamment excités, et produisent la lumière par désexcitation. Là aussi, le rayonnement se fait dans toutes les directions. Aussi, pour avoir, juste dans la direction de l’observateur, une émission intense, il faut que l’émission totale soit de très forte intensité. Donc que le milieu soit à un niveau d’énergie élevé.

Définition

D’après ce qu’on a vu ci-dessus, la définition d’une étoile symbiotique ne semble pas très aisée. Il s’agit d’objets complexes, aux comportements disparates. Les deux prototypes initiaux ont été observés avec des points de vue différents : R Aqr comme variable à longue période, et Z And sous l’angle de son spectre anormal. Ceci participe à la confusion sur la définition. D’autres systèmes ont été découverts plus tard, après l’observation d’un sursaut pouvant aller jusqu’à 7 magnitudes (T CrB et V1016 Cyg par exemple).

La première définition donnée par Merrill était basée sur les similitudes avec 5 prototypes : Z And, BF Cyg, CI Cyg, RW Hya et AX Per (Z And n’en fait pas partie, puisqu’elle était observée par un autre chercheur). Mais ceci s’est montré insatisfaisant, car bien d’autres étoiles présentent des ressemblances, sans pour autant être explicables par un même modèle théorique.

Pour mieux filtrer, on a ajouté des règles que les candidates devaient satisfaire : une variabilité optique irrégulière, des raies d’émission d’ions avec potentiel d’ionisation supérieur à 55 eV, et surtout que l’étoile soit inclassable ailleurs !!! Cette dernière contrainte met en lumière l’aveu d’impuissance des deux qui la précèdent.

Comme on pouvait s’y attendre, les études ont amené progressivement une clarification des idées, même si on n’est pas encore au bout du chemin. Nous admettrons donc, en suivant S. Kenyon, qu’une étoile est symbiotique si :

Le troisième point présente une alternative. Il ne faut pas voir là deux sortes différentes de variables symbiotiques (bien qu’elles soient très diverses), mais deux phases successives dans l’évolution d’une même étoile. La première alternative correspond à la phase calme, dans laquelle l’étoile passe le plus de temps. Mais l’autre alternative décrit la phase éruptive, qui peut être longue. C’est pourquoi les chances de l’observer sont importantes, et par suite sa description nécessaire.

Résumé

Comme nous l’avons vu, le spectre d’une étoile symbiotique comprend :

L’association d’une géante rouge de type M, G ou K, et d’une étoile chaude de type O ou B, permet d’expliquer ces diverses caractéristiques. L’étoile chaude donne le continuum bleu, la géante le continuum rouge. Les nébulosités qui entourent l’ensemble expliquent les raies d’émission : excitées par l’étoile chaude, elles se désexcitent en émettant cette lumière. Les fluctuations de faible amplitude sont produites par le mouvement orbital, et celles de grande amplitude proviennent des instabilités de l’étoile chaude.

Ainsi, les idées de base sont mises en place. Il reste à considérer les détails, et à trouver un modèle pour expliquer toutes les observations.

Localisation

Un échantillon de 125 étoiles symbiotiques confirmées permet maintenant d’établir des statistiques, qui apporteront un éclairage sur leur constitution physique. La première concerne tout simplement leur position dans le ciel.

Position des étoiles symbiotiques dans la Galaxie d’après S. Kenyon

Ce schéma montre la position des étoiles symbiotiques par rapport aux coordonnées galactiques : longitude en abscisse, et latitude en ordonnée. On voit une très forte condensation de ces étoiles en direction du centre galactique. Or, quelle est la population d’étoiles qu’on trouve dans cette partie de la Galaxie ? Ce sont des étoiles vieilles, de population II. Ceci est un indice fort pour déterminer les propriétés physiques des étoiles symbiotiques.

Sur le plan observationnel, on peut même penser que la concentration centrale est encore plus forte qu’il ne parait, car le rougissement et l’extinction vers le centre de la Voie Lactée ne peuvent que diminuer le nombre réel d’étoiles observables dans cette direction.

Enfin, on a découvert quelques étoiles symbiotiques dans les Nuages de Magellan, et une dans la petite galaxie ellipsoïdale du Dragon. Quatre de des objets contiennent des étoiles carbonnées, preuve que le phénomène symbiotique peut se produire plus ou moins indépendamment de la composition chimique des étoiles.

Les modèles

Nous avons déjà envisagé un couple stellaire. Mais bien évidemment, tous les chercheurs n’ont pas été d’accord sur ce principe. Et des modèles ne faisant intervenir qu’une seule étoile, satisfaisant ainsi au rasoir d’Ockham, ont été proposés.

L’un de ces modèles envisageait une variable à longue période très évoluée, dont le cœur était pratiquement dépouillé de son enveloppe, donc très chaud et responsable des raies d’émission. L’enveloppe constituait la nébuleuse froide, qui expliquait les raies d’absorption.

Un autre type de modèle évoquait une étoile géante normale, dont la chromosphère et la couronne étaient particulièrement actives.

Lorsque les observations ont pu accéder, grâce aux moyens spatiaux, aux longueurs d’onde absorbées par l’atmosphère terrestre, ont constata que ces modèles étaient en désacord plus ou moins flagrant avec les nouvelles données. Les rayons X en particulier leur ont été fatals.

La phase calme

D’après ce que nous avons déjà vu, à partir de l’étude des spectres, les étoiles symbiotiques sont constituées d’une géante rouge, d’une étoile chaude, et d’une nébuleuse. Nous entrerons dans les détails plus loin, mais l’existence de ces trois composantes donne à penser que l’objet est très complexe. Nous sommes loin de l’étude d’une petite étoile bien tranquille ! Ici, nous avons un couple qui se dispute en s’envoyant des nébuleuses... Nous ne serons pas étonnés si les phénomènes sont complexes, et si leur interprétation est difficile. Plus encore, on peut envisager qu’il n’y ait pas un modèle unique, mais plusieurs solutions plus ou moins différentes à ce problème.

Définition récente

Belczinsky a donné en 2002 une définition directement dérivée de celle de Kenyon :

Ces contraintes sont proches de celles de Kenyon, et celui-ci affirmait que toute étoile symbiotique les a violées au moins une fois ! Comme dans la définition de Kenyon, l’aternative entre les raies d’ions et le continuum sépare les phases calme et active, et non des types d’étoiles différents.

1ere composante : la géante rouge

C’est bien celle qui pose le moins de problèmes. Il s’agit en effet d’une étoile ayant quitté la séquence principale après épuisement de son hydrogène central. Elle peut se trouver sur la branche des géantes, juste avant le flash de l’hélium, ou bien sur la branche horizontale, en train de fusionner son hélium central, ou encore plus tard, sur la branche asymptotique avec un cœur inerte de carbone-oxygène, surmonté d’une coquille de fusion de l’hélium, et encore d’une coquille de fusion de l’hydrogène.

Entre ces deux zones de fusion, les échanges d’énergie sont complexes, et l’équilibre difficile à atteindre. Il s’ensuit des pulsations dites pulsations thermiques, qui sont représentées dans le diagramme HR par la bande d’instabilité. Les variables à longue période de type Mira s’y trouvent.

Cette étoile est évoluée (géante rouge), et donc son enveloppe est dilatée. Dans quelle mesure ? En fait, cette question n’a pas de sens toute seule. Envisageons aussi la distance orbitale des deux étoiles. Les étoiles sont entourées par leur surface de Roche, où la gravité des deux composantes s’équilibre. Si les étoiles sont proches, la géante peut remplir son lobe de Roche, et alors déverse beaucoup de matière sur sa compagne. Par contre, si la distance est plus grande, le lobe de Roche ne sera pas plein, et ce mécanisme ne jouera pas. Dans les deux cas, la géante rouge souffle un important vent stellaire. Ce dernier est la seule alimentation de la compagne si elles sont distantes, et il s’ajoute au déversement par le point de Lagrange si elles sont proches.

Seconde composante : l’étoile chaude

Le problème est plus difficile. La diversité des observations ne s’accorde pas avec un type donné d’étoile. Il faut en invoquer plusieurs pour cela. Dans de nombreux cas, l’étoile est très chaude, et compatible avec une naine blanche. Mais dans d’autres cas, une étoile moins chaude est suffisante pour expliquer l’ensemble. Et même une étoile de la séquence principale convient.

Dernière composante : la nébuleuse

Les observations sont difficiles, et la confusion possible. Certaines étoiles ont été classées comme nébuleuse planétaire, puis comme étoile symbiotique, et peut-être aussi l’inverse. La différence est subtile, parce que ces deux objets sont de nature très voisine. Une étoile évoluée perd beaucoup de masse par vent stellaire après sa phase AGB ; si elle est isolée, elle produit une nébuleuse palnétaire. Dans une étoile symbiotique, si le lobe de Roche n’est pas rempli, le phénomène est le même ! La seule différence est qu’une étoile chaude proche excite cette nébuleuse, et que la matière y tombe. Des phénomènes de type nova vont, dans ce cas, s’ajouter.

Formation

Dès l’instant où, dans un couple d’étoiles, l’une est de faible masse, et l’autre de masse moyenne, la seconde évolue plus vite, et devient une géante rouge alors que la première est encore sur la séquence principale. Il y aura forcément apport de matière, par vent stellaire seul ou avec déversement par le point de Lagrange, et donc interaction symbiotique. Ce phénomène est donc très répandu. Si on ne l’observe pas davantage, c’est parce que sa durée est faible.

Plus tard, la seconde étoile devient à son tour géante rouge, et le phénomène se reproduit à l’envers. La première étoile a pu, entre temps, devenir une naine blanche. Par conséquent, le phénomène symbiotique s’explique avec une géante rouge et une autre étoile plus ou moins évoluée.

Spectre UV et visible de AG Peg figure d’après Mikolajewska, 1997

Cette figure montre le spectre de l’étoile symbiotique AG Peg. On y voit à gauche le continuum UV (en bas) et les raies d’émission (au-dessus) provenant de la composante chaude, en bas à droite le continuum visible de la composante froide, échancré par ses bandes d’absorption ; de la droite au centre les raies d’émission de la série de Balmer de l’hydrogène.

Vous pourrez remarquer que le minimum du spectre se trouve centré sur 4.000 Å, c’est-à-dire dans le visible. Ni la composante chaude, ni la composante froide ne brillent beaucoup dans cette région du spectre.

Classification

Selon l’aspect considéré, on distingue trois classifications des étoiles symbiotiques :

Etoiles S

Les étoiles classées S sont des géantes de type spectral M, donc rouges, avec un excès d’oxygène et des bandes de l’oxyde de zirconium ZrO. Les éléments lourds, dont l’oxyde de zirconium, qui se trouvent dans leur enveloppe s’expliquent par des réactions nucléaires d’addition de neutrons, par le processus s. Le seul mécanisme capable de produire ces éléments dans des conditions d’énergie relativement basse est un mécanisme d’addition de neutrons. S’il est difficile d’ajouter un proton à un noyau, à cause de la répulsion électrostatique, il n’y a aucune difficulté à ajouter un neutron, puisqu’il ne subit aucune répulsion. Même un neutron de faible énergie peut se coller à un noyau. D’autre part, sa neutralité ne change pas les propriétés chimiques de l’élément, mais il donne un isotope plus lourd. On distingue deux cas, selon le taux de production de neutrons :

Le taux élevé de production de neutrons nécessaire pour le processus-r se rencontre dans les phases explosives : supernovæ. Par contre, le processus-s se contente très bien du faible taux rencontré dans les enveloppes des étoiles symbiotiques.

Le technétium est produit de cette manière, et sa présence prouve donc l’action du prcessus-s.

Certaines de ces étoiles (les mira) montrent du technétium dans l’enveloppe. Or le technétium n’a aucun isotope stable : le plus résistant a une période de 2,6 millions d’années. Aussi, si on l’observe dans l’enveloppe d’une étoile, c’est qu’il y a été produit récemment.

Recette pour confectionner une symbiotique

Ingrédients

Un couple orbital d’étoiles de la séquence principale. On nommera primaire l’étoile la plus massive des deux, et secondaire l’autre.

Si les étoiles sont moins massives que le Soleil, leur durée de vie sur la séquence principale est supérieure à 10 milliards d’années, si longue qu’elle n’ont pas eu le temps de devenir géante rouge. De telles étoiles ne peuvent donner une symbiotique. A contrario, si elles sont plus massives que 3 M, leur luminosité est bien supérieure à ce qu’on observe. Nous prendrons donc des étoiles de masses comprises entre 1 et 3 M.

Ceci étant, la période orbitale est un paramètre décisif pour la réussite de la recette :

Les ingrédients que nous prendrons seront donc deux étoiles de masse moyenne (1 à 3 M), formant un couple de période supérieure à 100 jours.

La recette

Nommez A la primaire, et B la secondaire, A étant plus massive que B.

A, la plus massive, évolue plus vite, et devient géante rouge. Elle émet un vent stellaire fort, qui se répand dans l’espace pour former une légère nébuleuse, et dont une partie est capturée par l’étoile de la séquence principale B. Ce couple est maintenant une étoile symbiotique dont la composante chaude est sur la séquence principale. L’étoile chaude chauffe la nébuleuse, et lui permet de rayonner les raies d’émissions observées.

L’évolution se poursuivant, la géante rouge passe par la phase nébuleuse planétaire, où elle rejette son enveloppe, puis son cœur mis à nu devient une naine blanche. Nous avons maintenant un simple couple formé d’une étoile de la séquence principale et d’une naine blanche. Rapidement (une dizaine de milliers d’années), la nébuleuse planétaire se dissoud dans l’espace et devient invisible.

Le temps passe, et l’étoile B, la moins massive, quitte à son tour la séquence principale et monte la branche des géantes rouges. C’est elle qui émet maintenant un fort vent stellaire, et recrée une légère nébuleuse. Comme précédemment, une partie de ce vent stellaire est captée par l’autre étoile, la naine blanche. Le phénomène symbiotique se reproduit donc dans l’autre sens, mais cette fois la composante chaude est une naine blanche.

La suite voit l’étoile B passer par la phase nébuleuse planétaire, éjecter son enveloppe, puis devenir à son tour naine blanche. La fête est finie !

Dans ce scénario, on note trois paramètres au moins. Ce sont les masses des deux étoiles, et leur distance orbitale. La variation des masses ne change pas fondamentalement les phénomènes, mais la distance orbitale joue un rôle plus important. Si les étoiles sont éloignées, le couple est lâche, et les relations entre les étoiles limitées. En regardant de plus près l’évolution de la géante rouge, on doit considérer son passage sur la branche asymptotique. A ce stade, elle possède un cœur de carbone-oxygène, inerte, entouré d’une coquille où se produit la fusion de l’hélium, elle-même entourée d’une coquille où se déroule la fusion de l’hydrogène. Ceci s’explique évidemment par l’effet de la température décroissante en s’éloignant du cœur. Mais cette double source d’énergie est complexe, et l’équilibre bien plus difficile à atteindre que dans le cas simple d’une fusion centrale. Aussi, l’étoile entre dans une phase de pulsations dite thermiques (dans le diagramme HR, elle traverse la bande d’instabilité). La géante peut devenir une Mira, et on décrit ainsi certaines des étoiles symbiotiques observées.

Si les deux étoiles sont plus proches, sans trop, les phénomènes sont ceux décrits plus haut.

Enfin, si les étoiles sont très proches, la géante rouge peut remplir son lobe de Roche, et déverser une partie importante de sa matière sur sa compagne. Cette matière s’ajoute à celle perdue par vent stellaire. On obtient les étoiles symbiotiques semi-détachées. Remarquez que ceci se produit aussi bien avec B sur la séquence principale, qu’avec A naine blanche. Le modèle explique donc bien ce qui est observé.

Activité

Le scénario envisagé retrace les grandes lignes de l’évolution d’un couple d’étoiles de masse moyenne, et montre qu’il passe éventuellement deux fois par la phase symbiotique, une pour chacune des étoiles. Mettant en lumière l’échange de matière, il ne décrit pas les conséquences que ce dernier peut avoir. En étudiant les étoiles variables, nous avons passé en revue un certain nombre de cas dans lesquels un couple est impliqué. Les variables cataclysmiques, les novæ en font partie. Ces phénomènes se produisent en effet parfois dans les étoiles symbiotiques, avec plus ou moins de force. Des phases éruptives, dans lesquelles la matière déversée entraîne un emballement des réactions thermonucléaires à la surface de la naine blanche, c’est-à-dire un phénomène de nova, sont effectivement observés.

Supernovæ Ia

La primaire de certaines étoiles symbiotiques est une naine blanche, donc en équilibre par la pression de Fermi des électrons. Elle est en-dessous de la masse limite de Chandrasekhar. Mais si elle accrète de la matière de la géante rouge, sa masse peut augmenter.

Une alternative se produit :

Il faudra encore du temps et des études pour comprendre comment se fait la distinction entre ces deux alternatives. Le fait est que l’on observe bien des étoiles symbiotiques qui présentent un phénomène nova récurent, et aussi des supernovæ Ia. Il est peut-être possible que le phénomène nova n’entraîne pas une perte de masse importante, et permette ainsi l’augmentation nécessaire pour arriver à la limite.

Résumé

Les étoiles symbiotiques sont caractérisées par :

Le phénomène symbiotique est donc une phase normale dans l’évolution d’un couple stellaire. L’étoile la plus massive évolue plus rapidement, passe par le stade de géante rouge, où elle émet un fort vent stellaire. Celui-ci peut former une enveloppe en expansion, éventuellement captée par le compagnon moins massif. Mais ce dernier, de masse plus faible, évolue à son tour vers le stade géante rouge, alors que l’ancienne primaire a perdu une grande partie de sa masse. Son cœur dépouillé est chaud, et peut capter le vent stellaire de la géante rouge.

Avenir

Les étoiles symbiotiques sont des objets complexes, avec de nombreux paramètres entrant en jeu pour modifier leur comportement. Le scénario proposé ci-dessus s’adapte bien aux différentes observations, et semble donc correct dans ses grandes lignes. Mais bien évidemment, il n’y a pas deux étoiles symbiotiques semblables, et dans le détail, les choses sont très complexes. Pour mieux les maîtriser, il faudra accumuler davantage de données dans différentes longueurs d’onde, et prendre en compte davantage de paramètres. C’est le travail des chercheurs. Mais les ingrédients que nous avons considérés sont suffisants pour une compréhension correcte du problème.

Bibliographie

Outre de nombreux textes épars, un livre a fait le point sur ce sujet : The Symbiotic stars, S.J.Kenyon, Cambridge Astrophysics Series, Cambridge University Press Première édition 1986

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