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Mis à jour
le 18/08/17
 SN 1987 A
 

Le phénomène

Les supernovæ historiques sont mal connues, puisque anciennes et observées visuellement seulement. Les deux dernières dans notre galaxie sont celle de Tycho, découverte le 9 octobre 1604 dans Ophiucus, et celle de Kepler, découverte le 11 novembre 1572 dans Cassiopée.

Depuis 4 siècles, il n’y a plus eu de supernova dans la Voie Lactée. On observe de telles explosions dans d’autres galaxies, mais bien sûr avec moins de finesse.

Dans ce contexte, l’apparition d’une supernova en 1987 dans le Grand Nuage de Magellan (nébuleuse de la Tarentule) a été un événement extrêmement important. Le Grand Nuage est une galaxies satellite de la nôtre, qui se trouve à 170.000 AL seulement. C’est donc la supernova la plus proche depuis 4 siècles. De plus, les moyens d’observation sont les plus puissants et diversifiés que l’on ait jamais eu à notre disposition. Il en résulte une connaissance du phénomène dans de nombreux domaines de longueurs d’onde, et même dans l’émission de neutrinos !

SN 1987 A est donc à ce jour la seule observation complète d’une SN proche. Sa contribution à notre connaissance de ces objets est donc fondamentale. Le seul regret est qu’elle soit unique à ce jour.

Le nom est formé par les deux lettres SN pour désigner une supernova, suivies de l’année de la découverte, suivie d’une lettre indiquant l’ordre de la découverte dans l’année : A pour la première, B pour la deuxième… Au cas où l’on en découvrirait plus qu’il n’y a de lettres dans l’alphabet, on mettrait une seconde lettre : AB, AC…

L’essentiel

L’étoile qui a explosé était connue, c’était une supergéante bleue cataloguée sous le joli nom de Sanduleak -69° 202 (α = 5 h 35 mn 27 s ; δ = -69° 16,2’). Elle a été découverte le 23 février 1987. Elle est située à 169.000 AL, et sa magnitude a atteint 2,9. Elle n’a donc pas été extrêmement brillante vue depuis la Terre, mais pour la distance à laquelle elle se trouvait, ce n’est déjà pas si mal…

Il s’agit d’une supernova de type II (donc effondrement d’un cœur d’étoile massive).

Observation visible

L’observation dans le visible est classique. Elle a permis de construire la courbe de lumière, montrant qu’il s’agit d’une SN II, et de photographier son spectre.

Il a été possible de séparer dans la courbe de lumière, la partie produite par la désintégration du Ni de celle due au cobalt.

Observation en rayons X


SN 1987A en rayons X, prise par le satellite Chandra en janvier 2000
NASA/CXC/SAO/PSU/D.Burrows et al.

Cette photo a été prise dans le domaine X par le satellite Chandra. Elle montre une nébuleuse en expansion, constituée de gaz assez chaud pour produire des rayons X : sa température atteint les 10 millions de degrés. C’est la première observation d’une supernova en rayons X.

La nébuleuse est aussi observable en lumière visible. Le HST a montré une augmentation de brillance d’un anneau de matière entourant l’étoile détruite. Cet anneau provient d’éjection de matière bien antérieure à l’explosion, datant de plusieurs centaines d’années. Sa vitesse d’expansion est de l’ordre de celle d’une nébuleuse planétaire. Le gaz éjecté lors de l’explosion est beaucoup plus rapide, il s’échappe à 4.500 km s-1. L’arrivée de ce gaz dans l’ancienne nébuleuse produit une onde de choc, qui explique son chauffage.

Observation des neutrinos

Il s’agit là d’une grande première. La théorie prévoit une forte émission de neutrinos juste avant l’explosion (neutrinos responsables du refroidissement du cœur). Mais ils n’avaient jamais été observés, par manque de détecteurs.

Il est bien évident que l’on n’a pas construit les détecteurs de neutrinos pour observer les supernovæ. Leur but était d’évaluer les possibilités de désintégration du proton. Ils ont montré que ce dernier, s’il se désintègre, possède une période supérieure à l’âge de l’Univers (on se rappelle que le neutron isolé a une durée de vie de l’ordre du quart d’heure).

Ces détecteurs ont un autre résultat, double, à leur actif : ils ont d’abord mesuré un déficit des neutrinos solaires, par rapport à ce qu’on attendait théoriquement. Ils ont montré ensuite que le neutrino a une masse non nulle, bien qu’extrêmement faible, ce qui permet l’oscillation du neutrino (changement de neutrinos électroniques en neutrinos muoniques ou tauiques). C’est l’explication du déficit.

Enfin, en 1987, ils ont détecté les neutrinos produits par l’explosion de SN 1987 A, ou plus exactement les neutrinos qui ont refroidit le cœur, entraînant sa contraction puis son explosion. Ces neutrinos ont été observés quelques heures avant le phénomène visible, ce qui est bien compatible avec le délai qu’on attend. La bouffée de neutrinos a duré une dizaine de secondes.

Cet exploit est très important, car il renforce la base observationnelle des modèles de supernovæ.

Etoile à neutrons

On s’attendait à observer un pulsar à la place de l’étoile. Ce n’est pas le cas… Ceci est bien regrétable, puisque le tableau n’est pas complet. Mais toute étoile à neutrons n’est pas forcément un pulsar. Il faut pour cela qu’elle possède un fort champ magnétique (c’est le cas), qu’elle tourne rapidement sur elle-même (c’est aussi le cas), qu’elle émette un rayonnement intense à ses pôles magnétiques (on peut penser qu’elle le fait), mais il faut enfin que le rayonnement soit dirigé vers la Terre au cours de la rotation. Peut-être ce point n’est-il pas satisfait, nous empêchant d’observer.

Données

Luminosité neutrinique :5 1051 erg s-1
Durée de la bouffée de neutrinos :10 s
Energie d’un neutrino :10 Mev
Energie totale :3,5 1053 erg
Rayon :10 km
Libre parcours moyen d’un neutrino :10 m

L’ensemble de ces données est compatible avec ce que l’on attend d’une étoile à neutrons.

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