L’actualité du LAM Le cours à l’Observatoire
Historique de Marseille
liens
Mis à jour
le 17/08/17
 Jupiter
 

 

Carte d’identité
dimensions142.984 km
11,2092 Terre
 demi grand-axe778,412 106 km
5,203 UA
aplatissement0,06487excentricité0,09341
période de rotation9 h 55 mn 30 sinclinaison de l’orbite 1,3053°
inclinaison axe de rotation3,12°année sidérale11 ans 312 j 20 h 18 mn
diamètre angulaire49,8″vitesse orbitale13,0697 km/s
masse1.898,7 1024 kg
317,8 Terre
révolution synodique398,884 j
= 1,09 ans
masse volumique1,33 g/cm3
0,241 Terre
jour solaire moyen9 h 50 mn 31 s
sens rétrograde
vitesse de libération 59,54 km/salbédo0,52
pesanteur23,12 m/s/s
2,359 Terre
températuremin -150℃
max -150℃
nombre de satellites63atmosphèrepression -
H, He, CH4, NH3, C2H2, C2H6

Les éléments en gras sont tirés du livre Allen’s astrophysical quantities, quatrième édition

Une géante…

Vue de la Terre, Jupiter a une magnitude atteignant -2,5 ; elle est très brillante, c’est l’objet le plus brillant après Vénus. Première des planètes géantes, Jupiter est la plus grosse : son diamètre atteint 140.000 km, ce qui fait 11,2 fois celui de la Terre.

…gazeuse !

Son volume est 11,23 = 1.400 fois plus grand (le volume étant proportionnel au cube du diamètre). La première idée serait que la planète doit contenir 1.400 fois plus de matière que la Terre, donc que sa masse doit être 1.400 fois plus grande. Ce n’est pas le cas, elle n’est que 318 fois plus élevée… Ceci nous montre que la matière est moins condensée dans Jupiter que dans la Terre : la masse volumique de cette planète n’est que de 1,33 g/cm3 (contre 5,52 g/cm3 pour la Terre). Cette donnée montre clairement que Jupiter est d’une nature différente des quatre planètes telluriques. Si elle était constituée de cailloux, comme la Terre, sa masse volumique serait beaucoup plus élevée, au-dessus de 5. Pour être si légère, elle doit être constituéeessentiellement de gaz légers, hydrogène et hélium. Cette idée sera confirmée, et on dit que Jupiter est une planète gazeuse.

 Soit V le volume, r le rayon : V = 4/3 π r3
Soient Vj et Vt, rj et rt les volumes et rayons
de Jupiter et de la Terre : Vj / Vt = (4/3 π rj3) / (4/3 π rt3) = rj3 / rt3 = (rj / rt)3

Le rapport des volumes est le cube du rapport des rayons.

Soient M la masse, et ρ la masse volumique moyenne : ρ = M / V

ρj / ρt = Mj / Vj x Vt / Mt = MjVt / Mt Vj = Mj rt3 / Mtrj3 = (Mj / Mt) × (rt / rj)3

Un poids lourd…

Elle contient plus de matière que toutes les autres planètes réunies : 70 % de la masse du système solaire, Soleil exclu. Les 30 % restant se partagent entre toutes les autres planètes, les astéroïdes, la ceinture de Kuiper…

…lointain, froid…

Située à 778 millions de km du Soleil (5,2 UA), donc 778/150 = 5,2 fois plus loin que la Terre, elle reçoit donc 5,22 = 27 fois moins d’énergie que nous. Il doit s’ensuivre une température beaucoup plus basse que chez nous. Mais le problème est un peu plus compliqué, on le verra plus loin.

…et pudique

Jupiter est entièrement recouverte de nuages, comme Vénus. Ce que nous voyons de la planète n’est que la couche supérieure de nuages, le sommet de son atmosphère. Mais la comparaison s’arrête là : le sol de Vénus apparaît quelques dizaines de kilomètres plus bas, alors que celui de Jupiter, s’il existe, se trouve très près du centre. Comme pour le Soleil, c’est la partie où l’atmosphère devient transparente. Dans un petit télescope d’amateur, on voit distinctement des bandes parallèles à l’équateur, claires ou sombres, et avec un instrument de 200 mm de diamètre au moins, on distingue la Grande Tache Rouge. Celle-ci est connue depuis très longtemps (elle a été découverte par Robert Hooke en 1664) ; elle est permanente, visible depuis qu’on dispose d’instruments pour l’observer. La Terre pourrait y être contenue deux fois…

La Grande Tache Rouge permet très facilement de mesurer la rotation de la planète. On voit qu’elle fait un tour complet sur elle-même en un peu plus de 10 heures, donc beaucoup plus vite que la Terre. Mais ceci n’est qu’une estimation grossière, qu’il conviendra d’affiner par la suite. Toutefois, cette rapide rotation a une conséquence importante : Jupiter n’est pas ronde.

Dans un modeste instrument, on parvient à distinguer que le diamètre équatorial est plus grand que le diamètre polaire : 142.000 km, contre 134.700 km seulement. La planète est gazeuse, donc fluide. Sous l’effet de la force centrifuge, les régions équatoriales auraient tendance à s’échapper ; mais en s’amassant à l’équateur, elles augmentent la quantité de matière en ces régions, donc la gravité augmente aussi, et on atteint un équilibre. La fluidité de la planète, et sa grande vitesse de rotation, justifient l’aplatissement observé.


7 décembre 2000, résolution 144 km par pixel NASA/JPL/University of Arizona

Cette image a été composée à partir de 4 clichés pris par la sonde Galileo, et reconstruite pour simuler une caméra à grand angle. On voit en bas à gauche l’ombre d’Europe sur les nuages de Jupiter.

Il faut remarquer les bandes sombres, les zones plus claires qui s’alternent ; les marbrures montrent une forte turbulence générale dans l’atmosphère de la planète. Elles ont reçu des noms, du nord au sud :

siglenom anglaisnom français
NPRNorth Polar RegionRégion polaire nord
NTBNorth Temperate BeltBande tempérée nord
NTZNorth Tropical ZoneZone tropicale nord
NEBNorth Equatorial BeltBande équatoriale nord
EZEquatorial ZoneZone équatoriale
SEBSouth Equatorial BeltBande équatoriale sud
STZSouth Tropical ZoneZone tropicale sud
STBSouthTemperate BeltBande tempérée sud
SPRSouth Polar RegionRégion polaire sud
GRSGreat Red SpotGrande Tache Rouge
WOSWhite Oval SpotsTache blanche ovale

Enfin, la Grande Tache Rouge (à droite) est l’objet le plus spectaculaire sur Jupiter ; mais on voit également de nombreuses petites taches blanches, qui ont le même aspect global, mais en plus petit et moins coloré.


La Grande Tache Rouge photographiée par Voyager 1 à 9,2 millions de km
le 25 février 1979, résolution 160 km photo NASA

On voit bien ici l’allure tourbillonnante de la Tache Rouge. Egalement remarquable, la différence entre les côtés gauche et droit de la tache : un certain calme règne à droite, tandis que le côté gauche est particulièrement agité. L’aspect de ces régions est très changeant. Des nuages blancs sont pris dans des mouvements turbulents.

On voit aussi que la Tache Rouge se fait une place dans l’atmosphère en écartant les bandes qui l’entourent. La bande en-dessous montre une structure très turbulente, spécialement à gauche de la tache blanche. On voit plus bas quelques taches blanches (WOS ou White Oval Spots).

Bilan énergétique

Jupiter possède une particularité importante : on sait déterminer exactement la quantité de chaleur qu’elle reçoit du Soleil (27 fois moins qu’ici). On en déduit par conséquent l’énergie que la planète doit rayonner pour rester en équilibre thermique : si elle rayonne moins, elle se réchauffe, si elle rayonne plus elle se refroidit. Donc, elle doit rayonner exactement autant d’énergie qu’elle en reçoit du Soleil. Or elle en rayonne davantage ! Les mesures de l’énergie émise par Jupiter vers l’espace ont montré qu’elle était 2,5 fois supérieure à celle reçue du Soleil ! Etant donné qu’elle ne se refroidit pas, il doit y avoir une autre source d’énergie. D’où vient donc le supplément d’énergie émis par Jupiter ?

A priori, cette propriété caractérise les étoiles. Mais celles-ci produisent l’énergie par deux mécanismes différents :

La fusion est totalement exclue pour Jupiter, dont la masse est bien trop faible pour la produire (à peu près 100 fois trop faible). La contraction gravitationnelle est une source possible, si la planète n’est pas encore parfaitement en équilibre. Cette contraction serait très lente (quelques millimètres par an), mais suffisante pour produire l’énergie mesurée. Une autre explication est possible, en supposant que l’énergie gravitationnelle produite au cours de la formation de la planète n’est pas encore totalement évacuée.

La théorie communément adoptée jusqu’à quelques années en arrière était que la planète continuait à se contracter, et rayonnait donc par énergie gravitationnelle. Mais il semble que ce ne soit pas le cas, ou tout au moins que ce ne soit pas suffisant. Une nouvelle théorie indique que l’hélium dont elle est composée en partie constituerait de petites gouttelettes qui, plus lourdes que l’hydrogène dans lequel elles baignent, tomberaient vers les profondeurs de la planète. C’est une pluie d’hélium dans son atmosphère. En tombant, les gouttes perdraient de l’énergie gravitationnelle qu’elles communiqueraient à l’atmosphère en la chauffant. Cette théorie indiquerait que l’atmosphère de Jupiter serait donc enrichie en hydrogène (appauvrie en hélium) par rapport aux proportions que l’on attendrait par sa formation. Il semble que ce soit effectivement le cas. C’est une forme de différenciation qui se poursuit donc. L’énergie envisagée ici est encore de nature gravitationnelle, mais par le biais de la différenciation, sur un seul composant.

En résumé, l’énergie produite pourrait provenir de :

L’équilibre thermique de Jupiter se fait donc entre la somme de l’énergie reçue du Soleil et de l’énergie produite par cette pluie, et l’énergie rayonnée.

Cette énergie maintient les couches basses de l’atmosphère à des températures bien plus élevées que ce qu’on pourrait penser.

La variation de température entre les pôles et l’équateur est faible ; il n’y a donc pas de transport d’énergie comme sur Terre (vents alizés et courants marins). La circulation atmosphérique est plutôt gouvernée par l’énergie interne (alors que sur Terre, elle est gouvernée par l’énergie solaire).

L’atmosphère visible

Les nuages existent jusqu’aux altitudes où la pression atteint 1 bar. Plus bas, ils ne peuvent se former. Ils sont constitués de cristaux de glace d’ammoniac.

Les vents soufflent parallèlement à l’équateur. Autour de la Grande Tache Rouge, des vents s’écartent de cette direction générale, mais seulement localement, ne s’éloignant guère en latitude.

La vitesse des vents, en fonction de la latitude, présente une symétrie assez grande par rapport à l’équateur. Leur vitesse est très stable dans le temps, comme l’attestent les observations anciennes. Ces vents ne sont pas influencés par la direction du Soleil, pâle et peu efficace à ces distances. Ils sont produits par la rotation.

Outre la Grande Tache Rouge, l’atmosphère de Jupiter présente un autre type de formations, nommées WOS (white oval spots). De même forme mais plus petites et blanches, elles n’en ont pas la stabilité, ni dans l’espace ni dans le temps. Elles se déplacent par rapport à elle, on en voit parfois plusieurs, elles apparaissent et disparaissent et dernièrement on a observé la fusion de deux d’entre elles.

La Grande Tache Rouge et les WOS tournent sur elles-même dans le sens des aiguilles d’une montre dans l’hémisphère nord. C’est le sens inverse des perturbations à la surface de la Terre. Ceci est dû au fait que ces formations ne sont pas des dépressions, mais au contraire des zones de forte pression. Ce sont des anticyclones.

Il s’y produit de fortes décharges électriques. Enfin, elles montrent des variations de teinte importantes. Quelle est la nature de ces formations rondes ?

Depuis la Terre, il n’était pas possible de préciser davantage les propriétés physiques de l’atmosphère de Jupiter. Par spectroscopie, on a pu déterminer la composition moyenne du sommet des nuages, et on a montré que l’hydrogène y était dans la proportion de 88 % et l’hélium 11% ; les autres éléments chimiques ne sont présents qu’à l’état de traces. Ils sont sous forme de méthane (CH4), d’ammoniac (NH3), de gaz carbonique (CO2), d’eau (H2O)… L’abondance de l’hydrogène s’explique par deux arguments :

Dans ces conditions, une atmosphère est stable, même pour les gaz légers. La composition moyenne de Jupiter est donc très proche de celle de la nébuleuse qui lui a donné naissance.

L’atmosphère de Jupiter contribue pour une part importante à la masse totale de la planète. C’est le cas pour les 4 planètes géantes, alors que les atmosphères des planètes telluriques ont une masse négligeable comparée à la masse totale (quand il y a une atmosphère).

Les nuages sont constitués essentiellement d’ammoniac et de méthane. Avec cette composition, ils devraient être blancs, et non orangés. Ils contiennent donc des composés colorés, qu’on n’a pas encore découverts. Leur surface visible est à une température de -130 à -150 ℃, et la pression de l’atmosphère à leur sommet n’est que de 50 millibars (1.000 millibars à la surface de la Terre). Mais bien sûr, la pression augmente vite lorsqu’on descend dans l’atmosphère, et contrairement à une planète tellurique, cette augmentation n’a pas de limite précise, puisqu’il n’y a pas de sol.

L’arrivée des premières sondes près de Jupiter a montré la nature des bandes et de la Tache Rouge. Ce sont des phénomènes atmosphériques, leur aspect est différent, leur origine aussi :

La coloration de la Grande Tache Rouge pourrait provenir de composés phosphorés, mais on n’a pas encore d’explication sûre.

L’énergie interne produite par la planète entraîne un échauffement des gaz, qui se dilatent et montent sous l’effet de la poussée d’Archimède. Ces nuages arrivent à une altitude où ils perdent leur force ascendante. C’est là que nous les voyons, et ils nous apparaissent sous l’aspect des bandes claires. Les nuages ascendants contiennent de l’ammoniac, dont on n’a pas observé la signature spectrale dans les nuages descendants. L’ammoniac ne se détruit sûrement pas en passant des nuages ascendants aux nuages descendants, mais on ignore pourquoi on ne le détecte que dans les premiers.

video
(approche de Jupiter filmée par la sonde Galileo, NASA)

Les gaz s’écoulent alors vers les régions adjacentes, et se refroidissent. Ils y forment les bandes sombres. Plus froids, ils ont alors tendance à descendre, car leur densité a augmenté. Ainsi, les bandes claires sont des nuages ascendants, alors que les zones sombres sont leur contrepartie descendante. De plus, la rotation différentielle de l’atmosphère entraîne un cisaillement entre zones et bandes, qui produit la forte turbulence observée.

Lors de leur ascension, les nuages subissent un refroidissement et une diminution de pression. Les conditions physico-chimiques changeant, des réations chimiques se produisent. De nouveaux composés se forment, au détriment des anciens ; ceci entraîne un changement de coloration.

Des nuages d’ammoniac se forment dans les gaz qui montent des couches inférieures. L’ammoniac a été détecté par sa signature spectrale seulement dans les nuages ascendants, qui représentent 1 % de la haute atmosphère jovienne.

Dans la partie supérieure visible de l’atmosphère, les nuages sont rouges ou blancs. Il pourrait y avoir des flocons de neige d’ammoniac. Cette couche doit avoir une épaisseur de 30 km. Plus bas, on pense trouver des nuages d’hydrosulfure d’ammonium. Plus bas encore, les nuages doivent être bleutés, contenant des gouttes d’eau et des flocons de neige (d’eau).

Il est imaginable que des molécules organiques existent également dans ces zones. Et certains vont jusqu’à penser qu’une forme de vie très primitive pourrait s’y développer. Mais le brassage des nuages par la chaleur interne pourrait bien ruiner cet espoir.

Tout le reste de la planète, y compris l’atmosphère elle-même, ne peut pas être observé depuis la Terre, et les renseignements que nous avons sont indirects, fragmentaires et forcément approximatifs. Mais à force de construire des modèles et de les confronter avec les observations, on finit par obtenir un bon degré de confiance. Un vrai travail de bénédictin…

Le petit module de descente de la sonde Galiléo est arrivé sur l’atmosphère de Jupiter à la vitesse de 47 km/s. Il a fonctionné jusqu’à la pression de 22 atmosphères, et la température de 150 ℃. Ce niveau correspond à 130 km sous le niveau 0, où la pression est d’un bar. Il est évident que 130 km rapportés au rayon de Jupiter ne représentent pas grand chose. Pourtant, c’est la seule mesure directe que nous ayons de l’intérieur de la planète. Au cours de la descente, la sonde a mesuré la luminosité, le flux de chaleur, la pression, la température, la vitesse et la direction des vents, et la composition de l’atmosphère.

Jupiter possède probablement un noyau de la taille de la Terre. Comme la Terre, ce noyau doit être différencié : rocs au centre, surmontés de glaces. Bien sûr, aux température et pression qui règnent au centre de Jupiter, ces matériaux sont fondus.

Au-dessus du noyau, on trouve de l’hydrogène métallique. Cette couche s’étend jusqu’à 0,9 RJ. Il faut une pression énorme pour mettre l’hydrogène dans cet état. On parvient en laboratoire à reproduire cet état de l’hydrogène grâce à la cellule à enclumes de diamant.

Une telle quantité de matière conductrice de l’électricité est à l’origine du fort champ magnétique de Jupiter.

Au-dessus de l’hydrogène métallique se trouve une couche d’hydrogène et d’hélium liquides, non conducteurs. Cette couche s’élève jusqu’à l’endroit où la pression est suffisamment faible pour permettre l’évaporation. On passe alors à l’atmosphère à proprement parler. La température et la pression donnent au gaz une consistance proche de celle du liquide, et la transition se fait sans changement brusque de phase.

Vitesse des vents

Les bandes parallèles à l’équateur sont très stables dans le temps. Elles montrent de violents vents zonaux permanents. La GTR est en interaction constante avec les vents zonaux, et produit des structures turbulentes extrêmement complexes.

Orages et aurores

Des éclairs très lumineux se produisent vers le sommet des nuages, et émettent des ondes radio. Ils sont assez rares, mais 1.000 fois plus énergétiques que sur Terre. On les appelles siffleurs (whistler) car leur fréquence est descendante comme la fréquence d’un sifflement.

La nuit, dans les régions polaires, on voit des émissions visibles et ultraviolettes probablement produites par les particules chargées émises au voisinages de l’orbite de Io, et canalisées par le champ magnétique de Jupiter. Le mécanisme est semblable à celui qui produit les aurores polaires sur la Terre, excitées par les particules du vent solaire.

La face éclairée brille fortement dans l’UV, ce qui indique une température de la très haute atmosphère supérieure à 1.000 K.

Constitution de Jupiter

La difficulté première pour étudier l’intérieur de Jupiter réside dans les conditions extrêmes qui y règnent. Il est très difficile, sinon impossible, de les reproduire en laboratoire, et les propriétés de la matière dans ces conditions resteraient théoriques. Mais un travail de physique fondamentale a été développé récemment : il consiste à placer deux diamants taillés pointe contre pointe. La minuscule surface des pointes délimite entre elles un volume extrêmement petit (une petite fraction de mm3), mais dans lequel on peut placer, avec des joints spéciaux, une petite quantité d’hydrogène liquide. Ensuite, on appuie fortement sur les diamants à l’aided’un levier : la force est transmise sur une surface minuscule, résultant en une pression considérable. On arrive ainsi au million d’atmosphères ! Ceci permet d’étudier l’hydrogène dans les conditions qui règnent au sein des planètes géantes. De plus, le diamant est transparent ; on peut le traverser par un rayon laser, qui va apporter de l’énergie à l’hydrogène.

Cet outil a permi de tester les modèles d’intérieur des planètes gazeuses, et nous a appris beaucoup de choses à leur sujet. En particulier, on a pu mesurer la pression à laquelle l’hydrogène devient métallique (il est liquide, mais à haute température, donc ionisé). Etant donné leur masse, Jupiter et Saturne possèdent une couche d’hydrogène métallique. Par contre, Uranus et Neptune sont trop peu massives pour que l’hydrogène y atteigne cet état (pression trop faible).

Sur Jupiter, il n’existe pas de sol au sens où nous l’entendons pour les planètes telluriques. Pour les planètes géantes, on considère que l’atmosphère s’étend depuis l’espace jusqu’à la zone où la pression atteint 1 bar (à peu près la pression de l’atmosphère terrestre). En-dessous, c’est l’intérieur de la planète, même si c’est toujours gazeux.

Nous avons vu que le sommet de l’atmosphère était constitué essentiellement d’hydrogène et d’hélium. Il en est de même pour la totalité de la planète, qui est faite pour 90 % en masse d’hydrogène et 10 % d’hélium (en négligeant les autres éléments en première approximation).

La partie gazeuse de Jupiter, dont l’atmosphère est le sommet, représente le premier tiers du rayon de Jupiter. La pression n’y est pas assez forte pour liquéfier le gaz.

Au-dessous de ce premier tiers, l’hydrogène est liquide. A une pression de 1 million de bars (1 million de fois la pression atmosphérique terrestre), l’hydrogène est atomique et non moléculaire. Un peu plus bas, la pression est telle qu’il est ionisé : les électrons sont libres, et peuvent donc se déplacer sous l’effet d’une différence de potentiel. Cette matière conduit donc l’électricité (et la chaleur), et pour cette raison on l’appelle hydrogène métallique. Cet océan d’hydrogène de plusieurs dizaines de masses terrestres produit, dans sa rotation, un champ magnétique 17.000 fois plus fort que celui de la Terre. Il s’agit également d’un champ dipolaire, et s’il y avait des marins sur cet océan, ils n’auraient aucune difficulté à s’orienter avec une boussole… Mais attention, car le nord magnétique est au pôle sud de la planète !

En étudiant la rotation de Jupiter, et son moment d’inertie, on a montré qu’il doit y avoir au centre un noyau plus lourd, rocheux, d’une dizaine de masses terrestres. A densité égale à celle de la Terre, son volume serait 10 fois plus grand que celui de la Terre, donc son diamètre serait 2,15 fois plus grand. Il devrait faire un peu moins que 30.000 km de diamètre. Il pourrait y avoir aussi des glaces qui surnagent, et augmentent le diamètre.

Schéma de l’intérieur de Jupiter

Ce schéma montre un intérieur en trois parties. La température et la pression sont portées à gauche. Elles croissent fortement vers le centre.

L’hydrogène métallique pourrait représenter 75 % de la masse totale de la planète.

Le champ magnétique

En 1955, les radiotélescopes permirent de découvrir que Jupiter était une source extrêmement puissante d’ondes radio. On eut pour la première fois la preuve qu’une planète autre que la Terre possédait un champ magnétique. Depuis, les observations radio à partir de la Terre et les mesures effectuées par les sondes Pioneer, Voyager et Ulysse ont permi de mieux connaître ses caractéristiques.

Jupiter possède un fort champ magnétique. Ceci se conçoit aisément, si on songe que la planète contient énormément d’hydrogène à l’état métallique, c’est-à-dire conducteur de l’électricité. Les mouvements de cette matière engendrent forcément un champ magnétique ; la question est de savoir quelle est exactement sa forme. Y répondre donnerait des indications sur la circulation des charges électriques à l’intérieur de la planète.

Il s’agit d’un champ, en première approximation, dipolaire comme le champ terrestre, et son axe est incliné d’environ 10° par rapport à l’axe de rotation de la planète. L’étude des différentes émissions radio a permis de préciser la période de rotation de Jupiter, leur période donnant directement accès à la période de rotation de l’ intérieur planétaire où le champ magnétique est produit (l’observation des détails visibles ne donnaient que la période de rotation des nuages).

Le champ magnétique de Jupiter piège les particules du vent solaire. Comme la Terre avec les ceintures de Van Allen, la planète est entourée d’une ceinture de radiations mais beaucoup plus intense : elle est 25 fois suffisante pour tuer un homme.

Par ailleurs, la densité et la vitesse du vent solaire étant environ 25 fois plus faible au niveau de l’orbite de Jupiter qu’au niveau de l’orbite de la Terre, il en résulte que la magnétosphère jovienne est environ 100 fois plus étendue (si sa surface était lumineuse elle serait vue de la Terre comme un astre de dimension supérieure à la Lune et présentant une queue beaucoup plus longue que celle des plus belles comètes). Une autre différence avec la magnétosphère terrestre qui n’est peuplée que par les particules chargées du vent solaire, celle de Jupiter est également alimentée par Io dont le volcanisme, comme nous le verrons plus loin, éjecte une grande quantité de gaz et de poussières qui sont ionisés par le rayonnement UV du Soleil et se répartissent en un énorme tore de plasma entourant tout Jupiter au niveau de l’orbite de Io. La magnétosphère jovienne est donc un immense accélérateur de particules et on s’est aperçu que Jupiter est une des principales sources de rayons cosmiques de moyenne énergie observés dans le milieu interplanétaire jusqu’au voisinage de la Terre.

Tout comme sur Terre, les particules du vent solaire sont piégées dans ce champ magnétique, et en suivent les lignes en spiralant. Se concentrant dans les régions polaires, elle produisent au contact de l’atmosphère de magnifiques aurores polaires. Certaines ont été photographiées par les sondes en orbite.

Les anneaux de Jupiter

Jupiter possède des anneaux, comme Saturne, mais très ténus. Ils contiennent très peu de matière. De ce fait, ils sont totalement transparents pour un observateur terrestre. Il a fallu attendre qu’une sonde spatiale s’approche pour les photographier, et encore faut-il qu’elle détourne ses objectifs de la grande lumière réfléchie par Jupiter pour que les anneaux apparaissent.


photo sonde Galileo, NASA

Les anneaux de Jupiter ne contiennent pas de glace. Ils sont probablement constitués de poussières de silicates, dont la taille est autour de 1 µm. Ces particules de poussière proviennent des impacts de micrométéorites sur les satellites proches, Méthis, Adrastée, Amalthée et Thébée. Métis et Adrastée approvisionnent l’anneau principal, Amalthée approvisionne l’anneau interne de Gossamer, et Thébée l’anneau externe de Gossamer. A l’intérieur de l’anneau principal, on observe un halo, probablement constitué de particules chargées électriquement et donc soumises au champ magnétique de Jupiter.

Un anneau principal, le plus brillant, orbite entre 51.000 et 57.000 km au-dessus des nuages. Une extension arachnéenne de cet anneau s’étend jusqu’à l’orbite d’Amalthée (109.000 km au-dessus des nuages), tandis que vers le bas, l’anneau s’étend jusqu’à 20.000 km, mais ce sont sans doute des particules échappées de l’anneau principal.

Les particules constituant les anneaux ont une taille typique de quelques micromètres, plus fines que celles de la fumée de cigarette. Etant donnée leur faible dimension, elles diffusent la lumière vers l’avant et non vers l’arrière. C’est pourquoi les anneaux de Jupiter sont pratiquement indétectables depuis la Terre.

Certaines poussières qui composent l’anneau principal doivent être électriquement chargées, soit par interaction avec le champ de radiations de Jupiter, soit par photoionisation des atomes de surface. Si la charge électrique devient suffisante par rapport au poids de la poussière, celle-ci peut être entraînée vers des latitudes plus élevées. Ce mécanisme pourrait être la source du halo qui s’étend de l’anneau Gossamer vers le nord et vers le sud.

Les planètes Troyennes

Ce sont deux groupes d’astéroïdes qui circulent sur la même orbite que Jupiter, aux points de Lagrange L4 et L5, en avance ou en retard de 60° ; de ce fait, les deux groupes de planètes troyennes et Jupiter forment toujours les sommets d’un immense triangle équilatéral. Cette configuration est stable. Elle constitue une solution particulière du difficile problème des trois corps : on ne considère que le Soleil, Jupiter, et une particule de masse négligeable, incapable d’influencer les deux corps principaux, qui obéissent donc au problème des deux corps.

On connait 1.018 objets au point L4, et 626 au point L5. Voici quelques uns des plus gros ; ceux de gauche (les Grecs) sont situés au point L4, ceux de droite (les Troyens) en L5 :

588Achilles 624Hector
617Patrocles884Priam
659Nestor1172Enée
911Agamemnon1173Anchises
1143Odyssée1208Troilus
1404Ajax1867Deiphobus
1437Diomedes1870Glaukos
1583Antilochus1871Astyanax
1647Menelaus1872Helenos
1749Telamon1873Agenor
1868Thersites2207Antenor
1869Philoctetes2223Sarpedon

Satellites

Jupiter possède de nombreux satellites, certains formés en même temps que la planète, d’autres, plus petits, capturés par la suite.

Observation

Du fait du grand éclat de Jupiter, on peut la photographier au foyer d’un télescope avec l’oculaire en posant l’appareil sur pied fixe juste devant l’oculaire. La pose de l’ordre de 1 seconde permet cette manip avec une pellicule de 400 ISO.

Jupiter était au début de l’année 97 dans le Sagittaire, puis est passée dans le Capricorne.

---=OO=---